Le calme après la tempête

Depuis deux jours, Logan n'avait pas fait une seule pause, conduisant sans arrêt en ne voyant rien d'autre que la route filer sous les roues de sa voiture. Il parcourait depuis peu l'état de la Californie et le soleil l'éblouissait de plus en plus à mesure que sa fatigue grandissait. Quand la voiture fit une embardée vers la gauche et qu'il lui fallut plusieurs secondes pour se rendre compte qu'il fonçait droit vers le faussé, Logan décida qu'il était temps de faire une pause. Il freina d'un grand coup, laissant la voiture déraper un moment sur l'asphalte avant de reprendre le contrôle de son véhicule et de le garer sur le bas-côté. Il ouvrit la portière et se laissa glisser dehors, prenant appui sur l'habitacle afin de ne pas s'écrouler. Ses jambes semblaient avoir du mal à supporter son poids, il n'avait pas mangé grand chose ces derniers jours, obsédé par la seule idée d'avancer. Pourquoi, au juste ? Il n'avait rencontré personne et n'avait toujours aucun indice sur Rooney.

L'homme rouvrit la portière et se pencha pour attraper son sac à dos sur le siège passager, qu'il fit glisser sur ses épaules avant de verrouiller la voiture. Ça n'arrêterait sans doute pas un voleur, mais ça le retarderait assez longtemps, en tout cas. Puis, il observa les alentours. Il avait traversé une ville un peu plus tôt, qui semblait plutôt déserte. Il pourrait peut-être y trouver quelque chose à manger, voire même un lit confortable où se reposer quelques heures. Mais avant qu'il n'ait le temps de se décider sur la manière de se rendre jusqu'à cet endroit, trois rôdeurs déboulèrent de derrière la voiture. L'odeur de la chair fraîche commençait à attirer les dévoreurs. Il en voyait cinq de plus à quelques mètres devant lui, avançant lentement dans sa direction et il pouvait déjà entendre d'autres grognements venir de derrière.

Il fonça sur les trois premiers, allant à leur rencontre au lieu de se laisser attaquer. De la main gauche, il attrapa son couteau de chasse et le planta dans la tête du premier, qui tomba au sol dans un bruit sourd. Mais ceux de derrières étaient déjà sur lui et la mort de l'un des leurs n'en troubla aucun, ils continuaient d'essayer de l'attraper avec leurs doigts pourrissants sans prendre garde au reste. Pris par surprise par les deux autres rôdeurs qui venaient de l'encercler, Logan perdit l'équilibre et se laissa déstabiliser. L'un des rôdeur dont l'homme tentait de se protéger en levant le bras, appuya sur le poignet de l'homme, qui céda un peu trop facilement, enfonçant sa longue lame dans son épaule gauche, en même temps qu'il chutait au sol.

Alors voilà... C'était comme ça qu'il allait mourir : sur une route abandonnée au fin fond de la Californie, encerclé par des zombies, luttant pour les repousser avec des coups de pieds. Il allait devenir comme l'une de ces créatures... Et tout ça parce qu'il avait joué les cons et refusé de se reposer pour ne pas perdre de temps. Comme s'il n'avait pas tout le temps du monde pour errer sans but. Il était tellement fatigué et le couteau enfoncé dans sa chair ne l'aidait pas vraiment à se concentrer. Il ferma les yeux, cherchant à reconstituer le visage de la femme qu'il aimait. S'il devait mourir, autant que la dernière chose qu'il voit lui apporte un peu de bonheur. Mais quand le sourire joyeux de Rooney se dessina sous ses paupières, l'envie de vivre remonta en lui aussi vite qu'elle était partie. Il ne voulait pas mourir maintenant, pas comme ça. Pitié, pitié, pitié....

Comme si les dieux l'avaient entendu, la tête d'un zombie vola devant lui et le corps du déjà mort s'écroula à ses côtés. Logan ouvrit les paupières qu'il gardait fermé depuis quelques minutes et les posa sur une jeune femme qui, armée d'une machette, le débarrassait de ses ennemis. L'homme remercia silencieusement le ciel et se détendit un peu, ressentant enfin pleinement la douleur de sa blessure. Il entendit tout juste la jeune femme se pencher au-dessus de lui pour examiner sa plaie et se présenter. Il croisa rapidement son regard avant d'essayer de voir l'étendu des dégâts. Il ne voyait rien de plus que le manche noir de la lame et s'en empara de sa main droit. Quand faut y aller... D'un coup sec, Logan arracha le couteau, ne pouvant retenir un cri de douleur qui ne tarderait pas à attirer de nouveaux rampants.

« Moi c'est Logan... » lâcha-t-il dans un souffle. « Allez-y, j'vous en prie. »

Il serra la main sur le manche de son couteau, les deux bras posés au sol, essayant de tenir bon.